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Tshiuetin, le train du Grand Nord

Louise Malé-Mole

En 2005, les trois communautés autochtones de la Côte Nord — les deux communautés innues de Mani-Utenam et de Matimekush-Lac John, ainsi que la communauté Naskapie de Kawawachikamach — ont acquis, pour un dollar symbolique, la ligne ferroviaire qui relie ces deux territoires autochtones, de Sept-Iles à Schefferville. Auparavant détenue par la compagnie minière IOC qui exploitait la mine de Schefferville, cette ligne de train désormais exploitée par Transport ferroviaire Tshiuetin (1) est la première en Amérique du Nord à appartenir aux populations autochtones (2). Aujourd’hui essentiellement dédié au transport de passagers, mais aussi de marchandises, nous avons eu la chance de pouvoir emprunter une partie du tronçon, en rejoignant le train au milieu de son parcours à Emeril, pour nous rendre jusqu’à la deuxième étape de notre voyage : Schefferville. Au cours du notre trajet, j’ai pu discuter avec le chef de train Jos Shecanapish, qui m’en a appris un peu plus…

Le train du Grand Nord, comme il est surnommé, quitte Sept-Iles

(mile 0) tous les lundis et jeudi matin, à 8h. Si la durée du voyage atteint facilement 14 heures, nous en avons manqué toute la première partie. Nous sommes montés dans le train au mile 224 à l’arrêt nommé Emeril, après avoir roulé 1h depuis Fermont. Le train marque un arrêt ici, mais il faut savoir également qu’il peut s’arrêter n’importe où, à la demande des passagers qui souhaitent rejoindre leurs camps de pêche ou de chasse.

À notre arrivée dans le train, les passagers sont déjà en route depuis plusieurs heures. Les enfants jouent, construisent des cabanes, tandis que les adultes préfèrent se reposer. Malgré le peu de divertissement, l’ambiance reste joyeuse, et les enfants, nombreux, semblent s’accommoder le mieux de la longueur du trajet. Une cantine est installée dans un wagon, elle permet de se restaurer et de se retrouver autour d’une table.  

Itinéraire du transport ferroviaire Tshiuetin

©Louise Malé-Mole, 2018

Paysage vu du train

©Louise Malé-Mole 2018

Depuis 10 ans, Jos Shecanapish est chef de train. Depuis 10 ans, il observe le paysage qui relie Sept-Iles à Schefferville le lundi, Schefferville à Sept-Iles le mardi ; avant de renouveler l’expérience jeudi et vendredi. Si sa résidence principale se trouve à Sept-Iles, il est originaire de la communauté Naskapie de Kawawachikamach près de Schefferville. Et si deux fois par semaine, le lundi et le jeudi soir, il doit passer la nuit à Schefferville, il n’a cependant pas le temps de visiter sa famille à Kawawachikamach et dort alors dans une chambre mise à la disposition des employés au centre de Schefferville.

Jos m’informe que le train avance à une vitesse de 40 mph (65km/h) car les voies sont enneigées, et vont être en partie rénovées à l’été. Même si le trajet est long jusqu’à Shefferville (mile 356), le train est le seul moyen terrestre (3) pour rejoindre ces deux territoires très liés historiquement pour les innus qui vivaient à Sept-Iles l’été pour la pêche au saumon, et revenaient à Schefferville l’hiver pour chasser, bien avant que le train n’existe !

 

La nuit est tombée, nous empêchant de contempler le paysage qui défile sous nos yeux. Le train commence à ralentir, mais nous ne sommes pas pour autant arrivés à notre destination finale : peu avant Schefferville, au mile 330, le train passe au dessus du barrage hydroélectrique de Menihek (4), qui fournit en électricité Schefferville. Le train s’arrête alors pour laisser descendre deux travailleurs du barrage. Jos m’explique alors que les employés du barrage utilisent fréquemment le train pour rejoindre Schefferville, dont nous ne sommes plus très loin…

Le chargement des bagages à Emeril 

©Louise Malé-Mole, 2018

Jos Shecanapish, chef de train

©Louise Malé-Mole2018

Un enfant dans le train
entre Sept-Iles et Schefferville

©Jacob Ethier, 2018

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